for soprano and electronics (2023)
Instrumentation
Soprano or Mezzo-soprano
Electronics : treatments in real-time and spatialization, 8-channel fixed media + 20-channel fixed media for an IKO loudspeaker ([option] and/or High Order Ambisonics system), amplification
Duration
13’30”
Premiere
14th September 2023, Paris (France), Espace de projection (IRCAM), Myrianne Fleur (Sop.), Masahiro Aogaki (Elec.), Simone Conforti (Educational Support/Computer Music Designer), Jérémie Bourgogne (Sound Engineer), Alban Rouge (Lighting)
Interview by Jérémie Szpirglas (FR)
Au cours des trois dernières années, la figure du poète Ghérasim Luca est omniprésente dans votre travail : qu’y trouvez-vous ?
Les poèmes de Luca explorent une forme de primordialité de l’oral, abandonnant au passage toute cohérence discursive et sémantique au moyen notamment de glissements phonétiques. Ce qui m’a particulièrement fasciné chez lui, c’est le phénomène du « bégaiement » et sa physicalité, ce corps hors de contrôle, plongé dans une sorte de transe. Bégayer, c’est entrer en contact avec un autre soi, osciller entre le moi et le non-moi.
Avec (K)not(s) I, vous retrouvez Myrianne Fleur, soprano avec laquelle vous avez créé Dé-monologue d’après Luca, mais vous abandonnez le poète roumain. Vous continuez cependant à explorer une forme de schizophrénie ainsi qu’une profusion de langages et de pensées.
En effet, j’ai délibérément voulu prendre mes distances avec Luca. (K)not(s) I s’inspire donc de Knots (Nœuds) du psychiatre écossais R. D. Laing. Knots s’apparente moins à un recueil de poèmes qu’à un corpus de textes poétiques sur des personnes empêtrées dans divers tourbillons psychologiques, comme si elles étaient prisonnières d’effroyables labyrinthes de miroirs, et sur l’incommunicabilité entre les êtres. Dans ma pièce, j’ai utilisé des extraits de Knots, en particulier ceux relatifs à la communication et à la non-communication avec la mère du point de vue de l’enfant. Le « I » du titre n’est pas simplement le numéro « 1 » mais un « I », « Je » en anglais. Le titre peut alors se comprendre comme « Not I » (Pas moi), symbolisant la fragilité et l’ambiguïté de l’identité, tout en faisant discrètement référence au monologue homonyme de Samuel Beckett.
Cette dialectique nœuds/non-nœuds, moi/non-moi du titre se retrouve notamment dans l’articulation de deux types de diffusion sonore : une couronne de huit haut-parleurs directionnels et tangibles répond à un dispositif icosaédrique appelé IKO, invisible du public, mais créant un espace acoustique intangible et distinct.